TACTIQUE : BELLINGHAM, AVANCE CENTRE
- Dozilet Kpolo
- 12 févr.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 19 févr.
« Oh ! Avance là ! », hurlent de plaisir – apparemment – des conducteurs pressés de klaxonner. Un coup par-ci, un coup par-là, les voici transformés en une fraction de secondes en pollueurs sonores.
D’avancer, plus vite, Jude Victor William Bellingham, l’Anglais de 21 ans qui à cet âge-là a déjà 1 Coupe Intercontinentale, 1 Champions League, 1 Liga, n’a jamais eu besoin qu’on le lui dise.
Á force d’aller de l’avant, l’ex coéquipier de Sébastien Haller, occupe naturellement le même poste que l’Ivoirien : avant-centre.
Mieux, même, le milieu de terrain du Real Madrid a créé un poste hybride : celui d’avance centre.
Hier, face à des Citizens convalescents incapables de maintenir l’avantage (2-3), le troisième du Ballon d’Or 2024, derrière Vinícius et Rodri, le finaliste malheureux de l’Euro 2024, s’est encore illustré dans ce rôle. Explications.

JUDE BELLINGHAM, L’AVANT-CENTRE QUE LE REAL A SIGNÉ
Le 1er juillet 2023, Florentino Pérez perd l’un de ses chouchous, auréolé d’un Ballon d’Or, quelques mois auparavant : Karim Benzema. L’enfant de Bron, situé dans la banlieue lyonnaise, l’homme aux cinq Champions League s’envole pour l’Arabie Saoudite comme d’autres footballeurs de renom cet été là tels que Fabinho, Sadio Mané, Neymar, déjà rentré à Santos, etc.

BUSY DAY
Ce même 1er juillet 2023, le président de la Maison Blanche lâche 113 millions d’euros, soit 7 millions de moins que sa valeur marchande de l’époque selon Transfermarkt, pour s’offrir un Galactique : Jude Bellingham.

Les Merengue signent un milieu de terrain, tantôt offensif, tantôt défensif. Il est ce que les Anglais appellent facilement et vulgairement : un box-to-box. Dès qu’un milieu dispose de suffisamment de coffre pour faire facilement l’aller-retour entre Londres et Paris, Paris et Abidjan, on lui colle illico presto cette étiquette à la peau. Ça, c’est Jude Bellingham !
Doté d’une technique soyeuse, avec ses longues chaussettes trouées, pour contrebalancer la pression exercée par les bas nouveaux, le numéro 5 du Real Madrid, qui autrefois appartenait à un certain Zinedine Zidane, sait aussi marquer des buts. C'est Belligoal !
Deux vérités peuvent coexister partout hormis sur Twitter.
Et les Madrilènes s’en rendent très vite compte que leur nouvelle tête d’affiche, dans leur projet de dominer l’Europe, le Monde. Mais d’abord la Liga EA Sports : It’s in the game!
BAS LES BASQUES !
Athlétic Bilbao - Real Madrid, épisode 1 saison 2023/2024.

Placé à la pointe d’un système en losange, un 4 - 3 - 1 - 2, et les deux flèches brésiliennes de devant Vinícius Júnior et Rodrygo Goes, l’Anglais évolue donc juste derrière eux. Histoire de mieux profiter de leurs courses dans des directions diamétralement opposées ; les deux étant avant tout des joueurs de couloir plutôt que des attaquant de pointe.

Sa projection quasi systématique vers l’avant se matérialise par un but. Sur un corner de David Alaba, l’amateur de roulettes zidanesques manque sa reprise, tope plutôt le ballon qui meurt dans les buts basques (0-2, 36ème minute).
Le match suivant, face à Almería cette fois-ci. À l’exception d’Eduardo Camavinga, remplacé par le champion du monde 2014, Toni Kroos, c’est le même onze que Carlo Ancelotti reconduit.
LA SURFACE DE RÉPARATION, SON CHAMP D’EXPRESSION
Coup de billard dans la surface adverse, c’est qui qui est là pour en profiter et égaliser par la même occasion ? Jude Bellingham (1-1, 19ème).
Pourquoi s’arrêter en si bon chemin quand on a Toni Kroos, qui voit le départ et la fin d’une action de but ? L’Allemand aperçoit la course de l’Anglais pour se retrouver dans la surface. Celui-ci n’a plus qu’à reprendre le ballon du crâne. (1-2, 60ème)
Le double buteur, reconnaissant, le somme de venir se faire remercier. Score final : 3-1 pour les Madrilènes.
Celta Vigo , Girona, Osasuna, etc. L’international anglais inscrit ses (4) buts suivants dans la surface. Soit à la suite d’un mouvement qui finit dans la zone de vérité, soit en renard des surfaces. Jude Inzaghi.
Il faut attendre le 28 octobre 2023 et le Clásico pour le voir inscrire un but hors de la surface en Liga. Et quel but ! Une puissante frappe du droit, mi-extérieur, mi-coup de pied.
Avant son traditionnel but de renard des surfaces pour offrir la victoire aux siens.
Le Barça s’incline à l’aller comme au retour. Qui caché dans le dos de Jules Koundé et de la défense catalane inscrit le but victorieux ? Belligoal.
Le Real Madrid termine cette saison 2023/2024 avec la Liga, la Champions League entre autres.
Le vingtenaire délivre 13 passes décisives, inscrit 23 buts en 43 matchs. Le tout en n’ayant occupé qu’une seule fois seulement le poste d’avant-centre - toujours selon Transfermarkt.
C’était en Champions League et le match retour contre Leipzig (0-1). Rencontre, au cours de laquelle, il a délivré une passe décisive.
UN SEUL JOSELU PART ET TOUTE VOTRE AXE EST DÉPEUPLÉ
Madrid, Espagne : mercato estival 2024. Kylian Mbappé, champion du monde 2018, finaliste malheureux de l’édition suivante, malgré un triplé qui fera date dans l’histoire, Golden Boy 2017 et j’en passe, rejoint le Real Madrid pour la très, très forte de zéro euro. Sachant que sa valeur marchande était alors estimée à 180 millions d’euros.

Si le Terre entière pleure Toni Kroos qui quelques mois auparavant à annoncer son départ à la retraite, peu en font autant pour un joueur qui a pourtant tout donné à ce Real Madrid qu’il était même venu voir à Paris ; et ce cafouillage monumental lors de la finale de la Champions League face au Liverpool de Mohamed Salah (victoire madrilène, 1-0).

José Luis Mato Sanmartín dit Joselu. L’avant-centre de la Roja avec laquelle il a remporté l’Euro 2024 rejoint Al-Gharafa et le Qatar alors même que le Real s’apprêtait à lever son option d’achat. Probablement pour les services rendus face au Bayern Munich ; en demi-finale retour de la Champions League. (2-1).
Le Real Madrid démarre donc la saison sans véritable N.9 mais avec un N.9 floqué dans le dos de Kylian Mbappé.
Naturellement, l’axe est délaissé, dépeuplé, déserté.
BELLINGHAM AVANCE CENTRE, JUSQU’Á QUAND ?
Cette saison, le grand frère de Jobe qui fait le sien à Sunderland, en Championship, marque moins. 7 buts en 19 matchs de Liga.

En cause le repositionnement obligatoire de l’Anglais sur le flanc gauche, dans un 4 - 4 - 2 en phase défensive qui se transforme en 4 - 2 - 4, en phase offensive, lorsque l’Italien sourcilleux de satisfaire tout le monde aligne les 4 Fantastiques devant.

Ou la seconde version lorsqu'il est carrément aux avant-postes.

BELLINGHAM MOINS CRÉATEUR QUE PEDRI
Loin des buts, son efficacité en pâtit logiquement. 6 passes décisives pour 25 chances créées dans cette même Primera División.
À titre de comparaison, Pedri, le maestro d’un Barça joueur, lui, en a créé 39 mais délivré 3 passes décisives seulement. En ayant en plus disputé (3) trois matchs de plus.
Bloqué à gauche par Vinícius et Mbappé qui se marchent certes moins sur les pieds, mais sont spontanément aimantés l’aile gauche, bloqué à droite par le travailleur et technique Rodrygo Goes, le milieu gauche a du mal à exister. Conséquence : le joueur généreux prend des initiatives, joue son ballon, celui d’un avance centre.

Là où d’autres vont privilégier la passe en retrait pour mieux analyser la situation, humer l’air, comme si un bulletin météo allait tomber, le numéro 10 des Three Lions, lui, préfère entamer une série de passes (88,3% de passes réussies selon Who Scored) pour aller vite vers l’avant, ou encore dribbler ; chose que sa protection de balle lui permet.
Finalement, ce que certains appellent dépassement de fonction chez lui, ce sont les mouvements signature mêmes d’un avance centre.
En outre, la faible implication défensive du duo Mbappé - Vinícius, l’oblige à en faire plus et par conséquent il perd du jus et de la lucidité.
REMETTRE L'ÉLU AU CENTRE DU SUFFRAGE
Jude Bellingham est bon lorsqu’il est en face du jeu.
On ne sait pas pas s’il veut ou quoi mais on sait grâce à Opta que c’est sa position préférée, préférentielle à : 42% contre 2% seulement en tant qu’... avant-centre.
Samedi lors du derby madrilène, lorsqu’en seconde mi-temps, le changement tactique est plus visible, que le 3ème meilleur buteur du club en Liga (7 réalisations) est repositionné dans l’axe dans un 4 - 2 - 3 - 1, c’est lui qui manque d’abord de tromper Jan Oblak avant que Kylian Mbappé ne finisse par le faire.

Quelques minutes plus tard, c’est encore lui qui jaillit mais qui trouve la barre transversale cette fois-ci.
Jusqu’à ce que le Real Madrid signe un véritable N.9, et même au-delà, Jude Bellingham est et sera toujours l’avance centre.
Celui qui a poursuivi la course de Vinícius jusque dans la surface pour ensuite tacler le ballon (2-3, 92ème)
Celui qui n’a pas attendu, qui n’attend, qui n’attendra pas qu’on lui ordonne : « Oh ! Avance là ! » Comme ce soir face à City.
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